Le déclic a eu lieu aux ateliers PREVIRISQ’Inondations organisés par l’ANEB du 29 juin au 1er juillet 2022 au Grand-Bornand (Haute-Savoie). Les acteurs de la reconstruction de cette commune meurtrie par le débordement du Borne en 1987 qui provoqua la mort de 23 personnes, ont raconté qu’il a fallu 8 à 10 ans à la collectivité pour se reconstruire, et que tout le budget communal y est passé. Ils ont aussi dit que si ça se reproduisait aujourd’hui, cela serait bien plus long car les procédures pour aménager sont plus lourdes et le foncier est beaucoup plus cher. Il n’en fallait pas plus pour nous lancer !
- L’intérêt pour le temps long de la reconstruction
Lors d’une inondation catastrophique, l’attention se cristallise souvent sur le temps de la crise. C’est elle qui fait l’actualité par l’émotion qu’elle suscite ; la reconstruction qui suit dans le temps long étant généralement beaucoup moins mise en lumière.
Pourtant, cette période est déterminante : le territoire doit se rétablir vite, et en même temps « profiter de l’occasion » pour réduire sa vulnérabilité à des inondations futures : c’est ce qu’on appelle le « Build Back Better ».
Si la question de la réduction de la vulnérabilité par la reconstruction suite à une inondation (« Build Back Better ») a déjà été beaucoup étudiée, celle de la vitesse de reconstruction est moins abordée : chacun part du principe qu’un territoire va forcément se reconstruire le plus vite possible. Pourtant le doute est permis : est ce que certains territoires ne se reconstruiraient pas moins vite que d’autres ? Est-ce que se relever n’est pas plus long aujourd’hui qu’hier ? Est-ce que le Grand Bornand, qui a mis 8 ans à se reconstruire, en mettrait beaucoup plus aujourd’hui ?
L’enjeu est non seulement de reconstruire mieux mais aussi plus vite pour éviter que le territoire tombe en déprise. En effet, il est capital pour un territoire de se relever rapidement, tant pour ses activités économiques et sociales, que pour son développement.
- Impact d’une reconstruction sur un territoire
Ces questions sont d’autant plus importantes que les délais d’un retour à la normale sont très pénalisants pour un territoire. En effet, un territoire qui se reconstruit, c’est un territoire à vitesse réduite, ou même à l’arrêt. Il n’a plus les moyens d’être dans la course à l’attractivité pour attirer de nouveaux acteurs économiques, ni même retenir ses habitants. La mobilisation des agents territoriaux et du budget communal et départemental dans la reconstruction le pénalise sur le long terme. Plus grave encore, l’impact physique et psychologique de la catastrophe détruit des liens au sein des communautés, annihile leur capacité à animer le territoire et à envisager sereinement l’avenir.
Un territoire impacté par l’inondation est impacté deux fois : une première fois par la catastrophe qui le détruit, et une seconde fois par le temps long de la reconstruction, qui le paralyse.
Une reconstruction longue et difficile creuse l’inégalité entre les territoires à risque d’inondation et ceux qui ne le sont pas.
Pour éviter la déprise des territoires inondés, il est important d’anticiper les inondations à la fois sur les différents plans de l’aménagement, des politiques publiques et du renforcement des communautés d’acteurs. Il s’agit de faire en sorte que la catastrophe soit moins grave, la reconstruction plus facile et le territoire moins pénalisé.
- Territoires possiblement impactés dans le futur
De nombreux territoires en France ont déjà été confrontés à une ou plusieurs reconstructions suite à des inondations ; d’autres le seront inévitablement au vu du nombre important de territoires à risques dans notre pays ; et d’autres encore y seront confrontés au vu de l’impact du changement climatique sur les évènements pluviométriques à l’origine des inondations.
Le nombre de territoires qui, dans le futur, devront subir une reconstruction et son impact durable sur le temps long ne peut que nous alerter ! Cela démontre la nécessité à traiter ce sujet et à chercher comment réduire le relèvement des territoires.